On a souvent tendance à penser que le rôle du détective privé, ou de l’enquêteur privé, se limite au constat d’adultère. Il n’en n’est rien, la mission de l’enquêteur pouvant être beaucoup plus large.
Dans un premier temps, nous rappellerons les formes de divorce existantes en droit français, puis nous examinerons quel peut être le rôle du détective privé, aux différents stades de la procédure.
1. Les formes de divorce
La loi a prévu quatre formes de divorce, qui peuvent se regrouper en deux familles : les divorces voulus, au moins dans leur principe (procédure par consentement mutuel ou du divorce accepté) et les divorces subis (altération définitive du lien conjugale, et divorce pour faute). Un divorce a un impact sur la vie personnelle, mais aussi sur le patrimoine.
Lorsque les époux mettent un terme à la communauté de vie, la question du devoir de secours (prestation compensatoire, pension familiale) va se poser. Si la séparation entraîne une disparité trop importante dans les niveaux de vie des époux alors le devoir de secours va impliquer une aide financière de l’époux disposant d’une situation plus avantageuse car il est fréquent que l’un des époux choisisse de délaisser sa carrière professionnelle pour s’occuper de l’organisation du ménage et de l’éducation des enfants.
1.1. Le divorce par consentement mutuel
Dans ce cas de figure, les époux sont d’accord sur le principe de la séparation, ainsi que sur les effets (patrimoine, résidence, garde des enfants).
Depuis le 1er janvier 2017, l’intervention du juge n’est plus requise. Chaque époux doit choisir un avocat. Ils rédigent un projet de convention réglant les effets du divorce (art 230 du code civil). Il faut veiller au le réel consentement de chacun des époux et à l’équilibre de la convention. La convention sera ensuite enregistré chez un notaire.
C’est la procédure la plus rapide, l’idée est que chacun des époux puisse refaire sa vie rapidement, car il ne faut pas oublier que tant que l’on n’est pas divorcé, les obligations du mariage demeurent.
1.2. Le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage (aussi appelé le divorce accepté)
Ici, les époux sont d’accord sur la principe de la rupture du mariage uniquement. C’est le juge qui va s’occuper des effets du divorce (art 233 et 234 du code civil). Un des époux sollicite le juge, lequel contactera alors le second époux pour recueillir son acceptation du principe du divorce. Il prendra alors une ordonnance constatant l’acceptation, puis dans un second temps, s’occupera des effets de la séparation : effets tant personnels que patrimoniaux. Il est à noter que le juge ne se préoccupe pas des raisons poussant les époux à divorcer.
1.3. Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
C’est le cas lorsque l’on constate une cessation de communauté de vie pendant 2 ans, de façon continue (art 237 et 238 du code civil). Une rencontre pour des questions matérielles ou d’organisation n’est pas considérée comme la reprise d’une vie commune. En revanche, le cas d’une personne expatriée dans le cadre de son activité professionnelle, et qui continue de contribuer aux charges du ménage, ne rentre pas dans ce cadre. Il y a beaucoup de contentieux sur cette question.
1.4. Le divorce pour faute
La faute est définie par l’art 242 du code civil : il s’agit de “faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune”. Pour simplifier, on pourrait dire qu’il peut donc s’agir d’une faute “grave”, une seule fois, ou de plusieurs fautes, peut être “moins graves”, mais régulières. Il n’y a pas d’exemples précis de fautes, mais on peut se référer à l’art 212 du code civil qui fixe les obligations du mariage : fidélité, communauté de vie, respect, etc ... Il faut remarquer ici que la notion de faute est indépendante du calcul de la prestation compensatoire : l’époux “fautif” peut prétendre à une prestation compensatoire si ses revenus le justifient (ou l’absence de revenu). Il s’agit d’organiser un équilibre financier entre les future ex-époux.
2. L’intervention du détective privé
2.1 Avant la procédure
On conçoit facilement que la recherche de la preuve de l’adultère peut se faire avant même d’entamer une procédure de divorce : on est dans le doute, on cherche à savoir ...
En revanche, et même s’il y a faute, les époux peuvent décider d’une séparation par consentement mutuel, dès lors qu’ils sont d’accord sur le principe de la séparation ET sur les conséquences du divorce. Or, et comme on l’a vu précédemment, tant que l’on n’est pas divorcé, on est encore marié. Raison pour laquelle, la procédure de divorce par consentement mutuel a été accélérée et simplifiée par la loi portant réforme du divorce de 2004. Dans ce cadre, les époux opteront pour cette option, dans le but de pouvoir “refaire sa vie” le plus rapidement possible.
2.2 Pendant la procédure
Mais les époux peuvent être en désaccord sur les effets, les conséquences, du divorce. Constatant l’échec de la tentative de conciliation, le juge rendra une ordonnance de non-conciliation.
Comme le prévoit l’art 272 du code civil, les parties doivent fournir, pour permettre notamment de calculer la prestation compensatoire, une “[…] déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie.”
Il faut rappeler ici que le juge civil n’a pas les moyens de vérifier ces déclarations, il ne réalise pas d’enquête et les services de police n’interviennent pas en droit civil. De plus, la bonne foi des parties est présumée (art 2274 du code civil). Il appartient donc à celui qui met en doute l’exactitude des éléments fournis par une partie d’en apporter la preuve.
Dès lors, quels sont les éléments susceptibles d’être vérifiés ? Quelques exemples :
- il y a le conjoint qui, chef d’entreprise, ne se déclare aucun salaire et le justifie par une faible activité de sa société ;
- il y a le conjoint qui va invoquer des ressources faibles alors qu’il se livre à des activités non déclarées ;
- il y a le conjoint qui omet de déclarer une partie de son patrimoine immobilier ;
- il y a le conjoint qui dissimule la reprise d’une vie commune avec une personne dont les revenus lui permettraient de faire face à ses obligations alimentaires.
Concrètement, il va s’agir de tenter de diminuer son patrimoine ou ses revenus dans le but, selon les cas :
- de justifier l’impossibilité de remplir ses obligations en matière de devoir de secours, pour les uns ;
- ou, au contraire, de justifier la nécessité de percevoir un devoir de secours, pour les autres.
2.3 Après la procédure
Le divorce est maintenant prononcé, le devoir de secours est fixé, mais il peut être réévalué, selon les évolutions constatées par l’un ou l’autre des deux époux. En effet, certains éléments de la vie peuvent modifier les modalités de calcul du devoir de secours Par exemple, la perte d’un emploi, ou au contraire le fait d’en trouver un, la reprise d’une vie commune, etc ...
Ce sont les mêmes exemples que vus précédemment : l’un ou l’autre des époux peut être tenté de dissimuler sa nouvelle situation dans le but de continuer à percevoir une prestation compensatoire qui pourrait être réévaluée à la baisse.
Par ailleurs, les modalités de garde des enfants peuvent devoir être modifiées. Cela peut être le cas lorsque les horaires de travail, un déménagement, sont difficilement compatibles avec l’école. Ce ne sont que des exemples, mais le juge des affaires familiales examinera toujours la situation des ex-époux, dans l’intérêt des enfants. Là aussi, il peut être nécessaire d’apporter des preuves, lorsque les ex-époux sont en désaccord.
Conclusion
On peut être tenté d’essayer d’apporter les preuves nécessaires par ses propres moyens, mais cela peut être complexe. Il faut, de plus, garantir une certaine impartialité. Aussi le recours à un détective privé peut être une aide précieuse.